Et ça tombe bien, j'ai entendu des choses très intéressantes à l'International Snow Science Workshop d'Anchorage il y a une dizaine de jours.
A ma grande surprise, je n'ai pas été le seul à parler agilité puisque Grant Statham (Parks Canada Agency) m'a précédé.
Grant Statham, à propos du système de prévision Canadien
Mais surtout, j'ai pu constater des similitudes entre l'agilité et l'orientation prise par certains responsables de la sécurité en montagne. J'explique.
Jusqu'à maintenant, l'essentiel des efforts a porté sur la prévision, la prédiction des avalanches. Où et quand vont-elles se déclencher ? La Science s'est penché sur le problème, on a étudié et modélisé. Et hop, le tour est joué, il n'y a plus qu'à dire au Modèle quand est-ce qu'il a neigé, quelle température il a fait et d'où le vent a soufflé et on obtient une carte des avalanches qui vont se produire demain, en fonction de l'itinéraire choisi.
Euh... non, ça c'est dans nos rêves.
Car en fait, ça ne fonctionne pas. On ne sait pas prévoir précisément les avalanches. Et on est en train de s'en rendre compte. De s'apercevoir que La Science "classique", celle des maths et de la physique, ne peut pas tout...
Un peu comme dans le monde du développement logiciel, où l'on croit savoir prédire les fonctionnalités nécessaires, les performances que l'on obtiendra et le temps qu'il va falloir pour développer.
Mais non, ça ne marche pas. Il n'y a pas de recette, simple ou compliquée, pour prévoir cela. Que ce soit pour les avalanches ou pour le développement, il y a trop de paramètres et parmi eux - les plus complexes peut-être - des facteurs humains...
Mais alors, comment faire ? Il faut apprendre à composer avec l'incertitude et à diminuer celle-ci au fur et à mesure que l'on dispose d'informations. D'informations sur la situation actuelle, au moment et à l'endroit où l'on est - ou bien sur le projet sur lequel on travaille. Et pas de généralisation ! Les scientifiques des avalanches parlent de variabilité spatiale. Dans l'informatique, on dit que chaque projet est différent (Vous ne le dites pas ? Vous devriez...)
Comment composer avec l'incertitude ? Par exemple, en travaillant avec la vélocité (indication de ce qu'une équipe a été capable de réaliser jusqu'ici) et non avec des estimations en jours/homme faites on ne sait trop comment (enfin si, on sait bien comment). Ou encore en modifiant son itinéraire (son plan, quoi) en fonction des changements ou de nouvelles informations.
Ce qui devient alors primordial, ce n'est plus Le Modèle, mais la collecte d'informations sur la situation actuelle et la communication de celles-ci à tous ceux qui sont impliqués. Et la prise de conscience de l'incertitude. Un homme averti en vaut deux.
Il n'y a pas que les avalanches et le développement logiciel qui sont concernés, d'ailleurs. Il semblerait que certains sismologues ont renoncé il y a peu à prédire les tremblements de terre (merci Ievgueni pour l'info). Et qu'ils mettent désormais l'accent sur la détection et la diffusion de l'information en temps réel.
Etre averti au plus tôt des problèmes pour pouvoir réagir et limiter leurs conséquences...
Et encore merci à Alain et www.data-avalanche.org de m'avoir permis d'être à Anchorage !
Je suis en phase à 100% et cette prise de conscience me fait plaisir. Un homme averti en vaut deux et une équipe Agile performante, bien informée, développe une intelligence collective qui lui permet de permet de s'adapter et de prendre les meilleures décisions. Les modèles sont par nature limité devant l'incertitude et peuvent être déresponsabilisant. Travailler sur les bonnes informations, au bon moment, au bon endroit et compter sur l'intelligence et la responsabilité des hommes, je dis oui.
RépondreSupprimerMerci Fred ! "compter sur l'intelligence et la responsabilité des hommes"
RépondreSupprimerJe cite cet extrait, mais tes autres phrases le mériterait tout autant !